Inhumaines Florence Cochet

Coup de cœur

Un seul mot : jubilatoire ! Les recueils de nouvelles sont parfois inégaux. Celui de Florence Cochet est excellent de bout en bout. On passe d’un genre à l’autre avec un plaisir non dissimulé ! On sent chez l’autrice une maîtrise des différents genres littéraires qui lui permet de jouer brillamment avec leurs codes.

De la fantasy au policier, en passant par le fantastique et la science-fiction ou encore l’aventure et l’horreur, Inhumaines nous immerge, au propre comme au figuré dans certains des quatorze récits qui composent l’ouvrage, dans des univers tous plus différents les uns que les autres. Fil conducteur du recueil ? Les femmes tiennent la place d’honneur, elles sont la pièce maîtresse de toutes les nouvelles, elles en sont toujours les héroïnes principales, à la notoire exception de la génialissime nouvelle Le parfum du Lotus qui, si elle est donnée à lire à travers le regard d’un personnage masculin est peut-être la nouvelle qui sublime le plus la gent féminine. On a adoré tout le recueil, mais ce texte en particulier. A la fois drôle, érotique et sensuel, bel hommage à la littérature de genre où on suit les tourments d’un jeune homme né en Chine au XV^e siècle vouant un amour fou à Fang, et particulièrement à ses pieds bandés… Des circonstances particulières amèneront le jeune fétichiste à être vampirisé, condamné à traverser les âges et… L’évolution des chaussures qui accompagne l’émancipation des femmes ! C’est brillant ! On se prend à penser aux chroniques vampiriques d’Anne Rice, le sourire aux lèvres et on rit franchement quand le héros apprend à ses dépens qu’il faut toujours « déchausser les deux pieds avant de passer à table » !

Des Moon Boots aux Louboutin, en passant par les créations de Jimmy Choo, notre vampire passe de l’extase à la dépression par vagues successives et quand il se prend à rêver à sa mort, c’est une figure de femme fatale qu’il envisage pour lui porter le magistral coup de grâce dans une mise en scène qu’on vous laisse découvrir…

Qu’elles soient jeunes ou mûres, blondes ou brunes, les femmes qui traversent ce recueil sont confrontées à la vie, à la mort, au choix entre les deux. A celui de tuer ou être tuées. De traquées elles deviennent parfois chasseuses. Elles sont courageuses, résilientes, pleines de ressources. Qu’elles s’appellent Camille, Clara ou encore Tatiana, elles portent des récits forts qui vous transporteront aussi bien dans la réalité sordide des violences conjugales que dans des ailleurs où résonnent tour à tour les échos du roman d’aventure ou des récits fantastiques de Jules Verne, voire des échos de séries d’anticipation comme Black Mirror.

Une preuve que ce que les mauvaises langues ont tendance à nommer les « mauvais genres » littéraires, recèlent de vrais bijoux ! Ne passez pas à côté de celui-là !